
En salle le
9 janvier 2019
De
ROBERT ZEMECKIS
Avec
STEVE CARELL, LESLIE MANN, MERRITT WEVER
Genre
Drame (2h10)
Distributeur
Universal
L’histoire de Mark Hogancamp, victime d’une amnésie totale après avoir été sauvagement agressé et qui, en guise de thérapie, se lance dans la construction de la réplique d’un village belge durant la Seconde Guerre mondiale.
Destin animé
Le nouveau film de Robert Zemeckis met une technologie révolutionnaire au service d’un scénario et d’un héros aussi originaux qu’émouvants.
Spécialiste des défis technologiques et narratifs depuis « Qui veut la peau de Roger Rabbit ? « , pionnier des effets spéciaux « performance capture » avec « Le Pôle Express », Robert Zemeckis a également témoigné de sa virtuosité dans des films aussi différents que la trilogie « Retour vers le futur », « Forrest Gump », « Seul au monde » ou encore le splendide et méconnu « The Walk – Rêver plus haut. » Dans l’audacieux, spectaculaire et parfois déconcertant « Welcome to Marwen », il reconstitue l’histoire incroyable mais vraie d’un homme brisé qui tente de se reconstituer en reconstituant un monde entièrement peuplé de poupées.
UN AUTRE MONDE
Après avoir été violemment agressé à la sortie d’un bar, Mark Hogancamp (Steve Carell) est frappé d’une lourde amnésie dont personne n’ose espérer le voir sortir un jour. Assemblant des éléments de sa vie d’avant et de sa vie actuelle, il s’est construit le village imaginaire belge de Marwen, durant la Seconde Guerre mondiale. À Marwen, Mark est le capitaine Hogie, pilote de chasse héroïque, luttant contre ses assaillants, avec le soutien de ses précieuses amies. Il a ainsi érigé une saisissante œuvre d’art, mettant en scène des figurines étonnamment ressemblantes, en hommage aux femmes fortes qui l’entourent. À la fois refuge et exutoire, cette existence imaginaire lui permet de sublimer la réalité et lui donne la force de l’affronter. C’est en découvrant à la télévision un documentaire consacré à ce personnage hors du commun que le Robert Zemeckis eut envie d’en tirer un film. « Je pressentais la force, la portée et l’originalité d’une telle histoire », dit-il. « Le combat de Mark Hogancamp est inhérent à l’être humain, il est universel. Même si nous ne sommes pas tous confrontés à ce qu’il a pu vivre, nous comprenons néanmoins la nécessité de retrouver un équilibre mental et émotionnel. Mark avait ce besoin d’exprimer ce qui le dévorait de l’intérieur, pour l’aider à mettre fin à sa souffrance, à lui trouver une résolution. »
UN HÉROS PAS COMME LES AUTRES
De son côté, Steve Carell avait lui aussi vu le documentaire qui l’avait ému et motivé à agir. « J’ai commencé à me renseigner sur l’obtention des droits, et j’ai découvert que Robert Zemeckis les détenait et qu’il avait déjà écrit un scénario », raconte l’acteur. « Je l’ai alors contacté. C’est la première fois que je me jette comme ça dans l’arène, mais cette histoire me parlait, et je voulais en être, d’une façon ou d’une autre, comme acteur, producteur ou scénariste, peu importait. » Les deux hommes tombent vite d’accord : Steve Carell interpréterait le double personnage de Mark Hogancamp et son alter ego héroïque, le capitaine Hogie. « Steve n’est pas qu’un formidable acteur de comédie, c’est un grand acteur dramatique », affirme le réalisateur. « Il était capable d’incarner avec brio les deux Mark. Je savais qu’il serait un merveilleux Hogie, le fier-à-bras, et saurait aussi rendre justice aux failles et à la complexité émotionnelle de Mark. » Acteur et réalisateur se rendirent au nord de l’État de New York pour y rencontrer Mark Hogancamp un mois avant le début du tournage, ce qui leur laissa à tous deux une forte impression. « Avant toute chose, Mark est un artiste », se souvient Steve Carell. « La raison principale de notre visite était de le rassurer sur nos intentions. Je voulais aussi m’asseoir et parler avec lui, entrer dans son univers pour quelques heures, avec le plus de respect possible. Le monde qu’il s’est créé et son processus de guérison sont si riches et si complexes. Il est conscient de la façon dont les autres le perçoivent mais il est à l’aise avec ça, ce que j’ai trouvé très touchant. C’est un vrai gentil. »
UN PLANNING SERRÉ
Mais, une fois le scénario rédigé, sa visualisation exigea un soin tout particulier : il fallait recréer l’univers de Marwen, avec des poupées vivantes modelées sur des personnes existantes. Le film demanda une longue préparation, avec un premier coup de manivelle fixé au 14 août 2017. « On devait choisir les acteurs très vite, parce que les poupées devaient être fabriquées avant le début du tournage », explique le producteur Steve Starkey. » Ça peut paraître relativement simple, mais bloquer un acteur huit mois à l’avance et définir un emploi du temps précis pour tout le monde est un sérieux casse-tête ». Les poupées, plus que les acteurs, demandaient en effet un plan de travail rigoureux, défini à rebours. « Le temps alloué au casting était limité par le créateur des poupées et le costumier. Les acteurs seraient prêts, il fallait s’assurer que les 17 poupées le soient aussi, continue le producteur.
DES JOUETS HUMAINS
Les poupées femmes créées par Mark Hogancamp sont les compagnes fidèles du capitaine Hogie, mais elles sont aussi ses protectrices. Constamment menacées par l’occupant nazi qui ne cesse de les assaillir, elles sont armées jusqu’aux dents et prêtes à voler à la rescousse de Hogie à la moindre alerte. Autant d’un point de vue narratif que technique, les poupées de Marwen ont été traitées par l’ensemble de l’équipe comme des personnages à part entière, avec des dialogues, des costumes et des accessoires propres. La création des figurines a ainsi débuté plusieurs mois avant le début du tournage. Conçues par le superviseur des miniatures Dave Asling, qui a notamment contribué aux effets spéciaux de « X-Men : L’Affrontement final », elles ont été fabriquées à partir du visage et du corps numérisés des acteurs. Le perfectionnement du design de leurs visages, lui, a été le fruit d’une nouvelle technique de maquillage numérique. Kevin Baillie, le superviseur des effets visuels, et son équipe les ont alors fabriquées en volume, grâce à des impressions 3D, et peintes. Les poupées ont alors été à nouveau numérisées avec des coiffures spécialement créées. La forme initiale des poupées, comme leur long cou et leurs traits poupins, a été spécialement respectée. Leurs têtes ont été posées sur des corps aux articulations limitées, les rendant volontairement raides dans leurs poses et leurs mouvements, comme c’est le cas des poupées à l’échelle 1/6 datant de 2006, l’époque à laquelle Mark Hogancamp en a peuplé son village fictif. Pour Robert Zemeckis, il était important de trouver le juste équilibre entre jouet et humain, de saisir l’essence de l’acteur sans perdre l’artificialité de la poupée. Ceci demandait une attention et un soin méticuleux. « Si vous les voyiez dans un magasin de jouets, vous les trouveriez très belles, sans vous dire, ‘cette poupée ressemble comme deux gouttes d’eau à Steve Carell' », explique-t-il. « Mais si vous observez sa poupée plus longtemps et plus attentivement… alors vous pouvez vous dire: ‘Cette poupée ressemble exactement à Steve Carell’. C’est cette étroite fenêtre que nous avons cherchée à atteindre. »
MISSION : IMPOSSIBLE ?
Une des questions de base qui se posait avait trait à la façon de rendre compte de la double réalité de Mark Hogancamp. « Quand Bob Zemeckis m’a parlé du projet pour la première fois, on n’avait pas la moindre idée de comment on allait s’y prendre », raconte Kevin Baillie, le superviseur des effets visuels. « On a d’abord pensé qu’on allait construire un village sur un immense plateau et habiller les acteurs, puisqu’ils seraient traités en post-production pour les faire ressembler à des poupées, en leur ajoutant des articulations et en les adaptant aux mensurations de G.I. Joe ou de Barbie. » Des premiers essais ont démontré que ça fonctionnerait mal : non seulement ça coûterait très cher, mais ce serait laborieux à tourner. Le recours à la capture de mouvement et de jeu n’a donc pas tardé à s’imposer; Pour le réalisateur, il était primordial de pouvoir saisir les expressions faciales des acteurs et de les fondre avec leurs doubles numériques. Ainsi seulement, pouvait-il espérer une évocation convaincante des humains à travers leurs avatars. Durant l’étape de capture de mouvement, son équipe filma les acteurs afin de pouvoir se rendre compte de ce à quoi ils pourraient ressembler en miniatures. « Les caméras numériques pouvaient ainsi ‘lire’ les visage et transposer les images sur les visages tridimensionnels des poupées », détaille Robert Zemeckis. « Ça nous a permis de faire en sorte que les visages des poupées bougent exactement comme ceux des acteurs. »
Combiné à un ahurissant travail sur les décors, les maquettes, les costumes, la lumière et les couleurs, le résultat, où les poupées « vivantes » assurent aussi bien des gestes quotidiens, érotiques ou encore liées à d’impressionnantes séquences d’action guerrière, constitue un véritable prodige visuel. « Je voulais que la technologie soit le véhicule d’émotions profondes », dit le cinéaste. Qu’il se rassure : c’est bel et bien le cas.