
En salle le
27 février 2019
De
M. Hamidi
Avec
G. Lellouche, M. Bentalha
Genre
Comédie (1 h 43)
Distributeur
Pathé
Fred Bartel est le charismatique patron d’une agence de communication parisienne branchée. Après un contrôle fiscal houleux, il est contraint par l’administration de délocaliser du jour au lendemain son entreprise en banlieue…
France d’en-haut/France d’en-bas
Heureux réalisateur du « Grand bain », Gilles Lellouche retourne devant la caméra de l’auteur de « La Vache » pour une comédie sociale aux allures de choc des mondes.
Qui est Fred, votre personnage ?
Gilles Lellouche : C’est un type qui ne cesse de courir après plus de confort, plus d’argent, plus d’amour. Il court après sa femme, après son fils, après ses employés. Son existence est à l’image du marathon contemporain que l’on connaît tous. Dans le film, la vie semble lui dire : « Mon vieux t’as sacrifié pas mal de moments, de plaisirs et de gens au profit de ta petite réussite, maintenant, t’assumes, et tu regardes autour de toi. » La chanson d’Alain Souchon « Ultra moderne solitude » représente bien mon personnage : un homme qui s’est enfermé tout seul dans son boulot. Il lui faut un électrochoc pour le réaliser, et il va le subir avec le déménagement forcé de sa boîte parisienne en banlieue.
Comment vous êtes-vous glissé dans sa peau ?
Le réalisateur Mohamed Hamidi et moi avons eu bien sûr quelques séances de travail avant le tournage mais, globalement, le personnage de Fred était tellement travaillé à l’écriture, tellement détaillé et limpide qu’il était facile de l’appréhender. En plus, j’ai toujours eu le désir de jouer un chef d’entreprise entrainé dans cette course contre la montre qui est celle de beaucoup de gens aujourd’hui. Et puis, participer à un film aussi positif sur la banlieue et les trésors qu’elle recèle – pour qui veut bien la regarder ! – vous met tout de suite dans un état d’esprit qui facilite le jeu. Dès que l’on fait l’effort de sortir de chez soi, de son quartier, de sa zone de confort et de regarder sans aucun a priori, on est toujours charmé par le talent des autres. Ce film est un film de paix qui prône l’entente et la cohésion sociale et, aujourd’hui, on en a bien besoin.
Diriez-vous qu’au-delà de la comédie, le film envoie aussi un message politique ?
Bien sûr, et c’est très clair. « Jusqu’ici tout va bien » est une ode à la différence, à l’altérité, à la tolérance, au collectif et au pouvoir de l’humain. Ce que je trouve très noble et très efficace c’est que le message n’est pas martelé. Il est en filigrane, tout en étant évident. Ce qui me rend heureux, c’est qu’il existe des réalisateurs comme Mohamed Hamidi pour porter de cette façon-là, un message comme celui-ci.
Votre regard sur le travail des réalisateurs a-t-il changé depuis que vous avez réalisé votre premier film « Le Grand bain » ?
Pas du tout ! En fait, lorsque je suis acteur, je suis acteur. Point barre. Je suis là pour être connecté aux personnages qui m’entourent et pour porter les couleurs du rôle que je joue. Tout mon travail est d’être au service de mon personnage et de l’histoire à laquelle il prend part. Ce qui me permet de me laisser porter par le réalisateur et son imaginaire et, par-là même, de me sortir de mon quotidien. Ce serait vraiment injuste et bête que d’épier les réalisateurs et de juger leurs façons de travailler.
« Le Grand bain », « Pupille », « Jusqu’ici tout va bien »… Ces trois films parlent chacun dans leur genre de sujets de société. Est-ce un choix volontaire de votre part, un tournant dans votre carrière ?
« Le Grand bain », a été une aventure mûrement réfléchie. Mes rôles dans les films que vous citez sont à la jonction entre ce que l’on me propose et ce que je choisis. Après, c’est vrai que dans l’époque dans laquelle on vit, cela me semblerait complètement étrange, voire décalé, de ne pas jouer dans des films sociétaux. Si je suis à un tour-nant de ma carrière c’est aussi parce qu’on est à un tournant de notre société. Je ne pourrais plus, je crois, envers moi-même et les autres, ne faire que des films complètement déconnectés de la réalité, hors du monde et de la vie. J’ai envie d’être ancré dans le réel. Dans mon métier, si je peux prétendre à quoi que ce soit, ce serait de soigner quelques plaies. Si à travers mes films et ceux dans lesquels je joue, je peux témoigner mon amour de l’humain, alors, j’aurai réussi. Aujourd’hui, j’ai l’impression que l’intolérance revient en force, qu’on se cloisonne de plus en plus en fermant les yeux. Si les films, la musique et la littérature peuvent nous per- mettre parfois de faire un peu de bien, je suis heureux d’en faire partie.
Le titre du film, « Jusqu’ici tout va bien », pourrait-il aussi être votre propre devise ?
Absolument ! Pour moi, effectivement, jusqu’ici tout va bien ! Et j’espère de tout cœur que ce sera la devise de beaucoup d’autres pour avancer sans peur.