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« Et si je filmais les petits enchaînements hallucinants d’une immense catastrophe ? » – Jean-Jacques Annaud.

En salle le
16 mars 2022
De
Jean-jacques Annaud
Avec
Samuel Labarthe, Jean-paul Bordes, Mikaël Chirinian
Genre
Drame (2 H)
Distributeur
PATHÉ
La reconstitution heure par heure de l’invraisemblable réalité des événements du 15 avril 2019 lorsque la cathédrale subit le plus important sinistre de son histoire. Et comment des femmes et des hommes vont mettre leurs vies en péril dans un sauvetage rocambolesque et héroïque.
Moins de trois ans après l’incendie qui ravagea la mythique cathédrale, Jean-Jacques Annaud a réussi l’exploit d’en tirer un film aussi réaliste et poignant que souvent grandiose.
Voilà plus de quarante ans, très exactement depuis « Coup de tête » en 1979, que Jean-Jacques Annaud avait détourné sa caméra de tout ce qui pouvait ressembler à une vision réaliste de son époque. En accumulant les fresques préhistorique (« La Guerre du feu »), moyenâgeuse (« Le Nom de la rose »), animalières (« L’Ours », « Deux frères ») guerrière (« Stalingrad »), spirituelle (« Sept ans au Tibet »), exotiques (« L’Amant », « Or noir », « Le Dernier loup »), voire mythologique (« Sa Majesté Minor »), il est ainsi devenu une sorte de porte-drapeau de superproductions uniques en leur genre dans le cinéma français. « Le passé et l’ailleurs stimulent davantage mon imagination que le présent et l’ici », affirmait-il jadis. Mais aujourd’hui, s’il orchestre avec « Notre-Dame brûle » un de ces grands spectacles dont il a le secret, il le situe de plain-pied dans la modernité de son pays, moins de trois ans après les faits qu’il relate, ce qui constitue donc un véritable événement.
EN TEMPS RÉEL
Dans la soirée du 15 avril 2019, un incendie (qu’une enquête approfondie a définitivement classé comme accidentel) a provoqué sous les yeux ébahis de la planète entière l’embrasement la cathédrale Notre-Dame de Paris, un des monuments les plus anciens, célèbres et visités qui soient. Diffusée en direct à la télévision, la catastrophe a soulevé une immense émotion mémorielle, artistique, culturelle, pour certains religieuse, et sans les forces herculéennes mises en œuvre pour la circonscrire, nul doute que l’édifice, déjà très endommagé, aurait été réduit le jour suivant à l’état d’irrécupérable ruine fumante. « Le feu de Notre-Dame a non seulement ému le monde, mais a permis à la France, taraudée depuis tant de mois par le doute et la peur, d’être de nouveau fière de la compétence, du sang-froid, du dévouement de ceux qui ont contribué au sauvetage », dit Jean-Jacques Annaud. « Les pompiers, bien sûr, mais aussi la police, les architectes, les conservateurs, l’ensemble des services et des experts concernés. » Reste que dans son film, ce sont surtout les premiers qui sont mis à l’honneur. « La mode hollywoodienne est aux super héros gonflés aux stéroïdes, pilotant des vaisseaux intergalactiques digitalisés pour sauver l’humanité. Les nôtres sont ces soldats du feu, humbles, entrainés, admirables, qui ont choisi de mettre en danger leur vraie vie pour sauver un symbole : celui de Paris, de la France et d’une religion qui n’était pas forcément la leur », confirme-t-il. Résultat : un récit construit en « temps réel » qui, de l’étincelle fatale à l’extinction des ultimes flammes, déploie tous les moyens du cinéma pour impliquer viscéralement le spectateur.
Monumental
Financé, préparé et tourné avec une réactivité proprement inouïe, « Notre-Dame brûle » est pour Jean-Jacques Annaud le fruit d’un cheminement à entrées multiples. « Tu te rends compte le nombre d’abrutis qui vont se précipiter pour en faire un film ? », demanda-t-il à son épouse en apprenant, via radio car il était alors sans télévision à la campagne, la nouvelle de l’incendie le 15 avril 2019 peu après 18 heures ? Le temps de découvrir les premières images du brasier sur son smartphone et de constater deux jours plus tard l’étendue des dégâts (situé non loin de la cathédrale, le balcon de son appartement parisien était recouvert de cendres) en se rendant sur place, il est quelques mois tard sollicité par le patron de la grande compagnie cinématographique Pathé pour réaliser un documentaire sur la tragédie. Et le samedi 21 décembre 2020, sa décision est prise, mais pas sous la forme d’un documentaire : « Et si nous racontions la journée où tout a basculé ? Et si je filmais les petits enchaînements hallucinants d’une immense catastrophe ? » Il rassemble alors toute la documentation audiovisuelle possible, sollicite sur Internet tous ceux qui, dans le monde entier, ont capté ce jour-là des images du bûcher (il en recevra plus de six mille, photos et vidéos combinées), rencontre tous les intervenants de la tragédie (pompiers, ecclésiastiques, employés de Notre-Dame, personnalités politiques), consulte des dizaines de spécialistes (architectes, historiens)…
Résultat, en combinant archives d’actualités, images saisies à la volée, décors reconstitués en studio, maquettes et effets spéciaux dernier cri, le film qui s’offre aujourd’hui à vous s’avère une colossale et majestueuse réussite qui, au-delà de la puissante émotion qu’il génère sur l’instant, comporte des images et des séquences que vous ne serez pas près d’oublier.