The Bookshop

En salle le

19 décembre 2018

De

ISABEL COIXET

Avec

EMILY MORTIMER, BILL NIGHY, PATRICIA CLARKSON

Genre

Drame (1h53)

Distributeur

Filmcoopi

Dans une bourgade du nord de l’Angleterre, en 1959, la vie suit tranquillement son cours  jusqu’au jour où une femme décide de racheter une bâtisse désaffectée pour y ouvrir sa librairie. Une initiative qui sera loin de plaire à tout le monde.

Comment déclencher un scandale en ouvrant une simple librairie ? Trois fois récompensés aux Oscars espagnols, le film et sa réalisatrice Isabel Coixet ont leur petite idée.

De quelle façon est né « The Bookshop » ?

Isabel Coixet : J’ai lu le roman de Penelope Fitzgerald, il y a presque dix ans, lors d’un été particulièrement froid dans les îles britanniques. La lecture du livre a été une véritable révélation : je me sentais totalement transportée jusqu’en 1959 et je croyais vraiment que j’étais, en quelque sorte, la Florence naïve, douce et idéaliste. En fait, je le suis. Je me sens profondément liée à ce personnage, d’une manière que je n’avais encore jamais ressentie avec les personnages principaux de mes autres films.

Qu’est-ce qui vous intéressée dans le personnage de Florence ?

Les gens prennent des risques tous les jours. De grands risques, des petits risques, parfois dangereux parfois moins, mais la plupart passent inaperçus. Que se passe-t-il lorsqu’ils sont remarqués ? Et comment cela reflète-t-il le monde actuel dans lequel nous vivons tous ? Il y a quelque chose d’héroïque dans le personnage de Florence Green, quelque chose de simple et de familier. Elle s’installe avec le seul désir d’ouvrir une librairie et ne se soucie ni ne cherche aucun soutien dans son entourage. Elle retrousse simplement ses manches et y arrive. Du coup, Florence Green se fait remarquer.

Pourtant, certains ne la regardent pas avec bienveillance…

Voici le moment où cela devient intéressant. Cette femme tranquille, dans un village paisible, dans une Angleterre d’après-guerre très calme, est pour chacun un appel à grandir et à endosser la responsabilité de rendre la vie meilleure pour tous. Florence n’est pas le genre de personne qui se met en avant. Il y a d’autres personnes qui jouent habituellement ce rôle mais qui n’aiment pas qu’on usurpe leur place. Les actions de Florence mettent en lumière l’inaction des leaders sociaux et attisent leur colère.

Celle par qui le scandale arrive

Sa volonté d’œuvrer pour le bien public a-t-elle quelque chose de politique ?

Florence représente différents univers qui m’intéressent en tant que cinéaste. C’est une femme avec une vision que tous ne partagent pas. Ce qu’elle fait est nouveau, elle voit une opportunité de combler un manque puisqu’il n’y a pas de librairie dans sa ville. La prétention de Florence est de croire que cette ville souhaite autant qu’elle l’ouverture d’une librairie. Elle prend ce risque et certains agiront de façon très extrême pour la remettre à sa place. Florence défie la puissante élite locale, sans même s’en rendre compte. Elle a le soutien de la vieille garde du village, mais est-ce suffisant ? Ceux qui s’opposent à Florence sont comme ces gens agressifs sur l’autoroute qui poussent les conducteurs plus lents pour les écarter de leur passage. La victoire serait d’assister à leur arrestation par un magnifique après-midi.

Quelle morale peut-on tirer de l’histoire de Florence ?

Alors que nous observons les décisions qu’elle prend pour avancer, nous voyons l’effet de vague déclenché par cette goutte d’eau dans la mer et comment elle affecte ceux qui l’entourent. Bien qu’elle ne gagne pas la guerre, elle parvient à avoir un impact sur quelques personnes qui peuvent, ou pas, décider de mener des actions puissantes dans leur propre avenir. Au final, il y a la douleur sourde de l’inévitable. Les feux de la résistance ont besoin d’oxygène pour survivre. L’eau continue à couler et, alors que la moisissure pénètre dans une structure et la déchire, l’eau lave l’histoire. La guerre contre Florence n’a rien d’impressionnant. Nous sommes tous en tant qu’humains, pleins « de bruit et de fureur, qui ne signifient rien. » Elle perd sa bataille, mais peut-être a-t-elle influencé la prochaine génération de guerriers. Ma mission est de montrer que Florence nous a en effet tous inspirés, pour mener le bon combat.